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26èmes Journées Nationales Prison

Justice, prison : sortir du cercle vicieux

Publié par Julien Villalard, le 21 novembre 2019.





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Présentation :

Nos associations agissent dans l’univers carcéral, en détention comme à l’extérieur, depuis des dizaines d’années. Malgré tous nos efforts, et des évolutions législatives qui renforcent les droits des personnes, force est pourtant de constater que les problèmes perdurent et que certains d’entre eux s’aggravent. Cette année, nous vous proposons de travailler sur ce sentiment de tourner en rond qui peut parfois nous faire baisser les bras pour faire prendre conscience au grand public de ces problèmes et proposer des manières de sortir de ce cercle vicieux. Nous sommes convaincus que les missions dont vous êtes investis dans vos associations et aumôneries sont essentielles pour aller vers un système qui inclut plus qu’il n’exclut.

Notre système carcéral est pris dans un cercle vicieux : plus on incarcère, plus il est difficile d’accompagner les personnes pendant leur détention et après leur sortie qui est souvent peu ou pas préparée, contribuant à la récidive. Les personnes reviennent donc trop souvent en prison, ce qui renforce ce cercle vicieux. Cet effet est accentué par le fait que, face à la surpopulation carcérale, la réponse depuis les années 80 est une extension systématique du parc pénitentiaire : la construction et la gestion de ce parc pénitentiaire étendu mobilise une grande partie des moyens financiers et humains dévolue dans notre pays au ministère de la Justice, au détriment de ce qui permettrait de favoriser l’accompagnement, la réinsertion, et de soutenir les sorties de délinquance qui seraient les premières pistes pour sortir de ce cercle vicieux.

Différents mécanismes de notre système pénal contribuent à cette hausse de la population carcérale. Le premier facteur est sans doute l’allongement important de la durée des peines de prison. Cet allongement n’a pourtant pas fait disparaître les courtes et très courtes peines dont on sait qu’elles désinsèrent et précarisent déjà largement, sans laisser le temps de prendre en compte les besoins des personnes détenues et permettre la mise en place d’un accompagnement pouvant les soutenir.
La procédure de jugement en comparution immédiate est également un facteur qui contribue à l’accroissement de la population pénale, notamment pour les courtes peines : 70% des condamnations en comparution immédiates aboutissent à des peines de prison ferme.
L’augmentation de recours à la détention provisoire, qui a augmenté ces dernières années pour atteindre un taux de détention provisoire de 30%, l’un des plus hauts en Europe, est un autre facteur. .
À tout cela s’ajoute un fort contexte sécuritaire qui se traduit sur le plan législatif par des lois plus répressives (état d’urgence, criminalisation de certains comportements…) et trop peu de soutien au développement des sanctions appliquées dans la communauté. Le pénal n’est pas le seul domaine impliqué dans ce cercle vicieux : il faut s’interroger, en amont, sur le rôle et les échecs d’autres politiques publiques comme les politiques de prévention, d’éducation, d’insertion, de cohésion sociale.

L’augmentation du recours à l’emprisonnement est un phénomène observable depuis plusieurs décennies en France. Ainsi, d’un peu plus de 26 000 personnes en 1975, la population écrouée atteint environ 48 500 personnes en 2002 puis 82 000 en 2019 dont plus de 70 000 sont détenues. Cette augmentation se vérifie toujours lorsque ces chiffres sont comparés à l’évolution de la population française sur les mêmes périodes puisqu’en 1975 le taux de détention était de 49,5 personnes détenues pour 100 000 habitants, 87,6 pour 100 000 habitants en 2002 et 101,5 pour 100 000 habitants en 2016. La surpopulation induite par cette augmentation a des conséquences importantes pour le respect de la dignité des personnes détenues. Avec jusqu’à 200% de surpopulation dans certaines maisons d’arrêt, c’est toute la vie en détention qui est affectée ; de la vie en cellule avec des matelas posés à même le sol, à l’organisation des activités, à la possibilité de rencontrer ses proches ou encore l’accompagnement à la réinsertion par les services pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP).

Les réformes récentes n’ont apporté que des réponses partielles et insuffisantes quand elles ne renforçaient pas le cercle vicieux lui-même, comme avec les peines planchers. Dix ans après la loi pénitentiaire de 2009, une nouvelle réforme de la justice pénale a été adoptée dont nous craignons qu’elle ne conduise pas à sortir de cette logique d’incarcération toujours plus importante.

Peut-on imaginer d’autres solutions, qui permettraient de sortir du cercle vicieux, voire d’enclencher un cercle vertueux où la diminution de la population carcérale permettrait de mobiliser les moyens de l’État et les efforts des acteurs (publics et associatifs) pour éviter les retours en prison ?

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