Fédération des Associations Réflexion-Action, Prison et Justice

Les dettes du condamné

2006

La dette et son (ses) débiteur(s)

Toute dette a un (ou des) créancier(s), un (ou des) débiteur(s)
Une personne qui n’est ni créancier ni débiteur n’est pas concernée par la dette. Deux exemples :
• Une dette qui a deux débiteurs :
Un homme marié achète, sans avoir obtenu l’accord de sa femme, un réfrigérateur qui est utilisé par la famille. L’homme est incarcéré. La femme est obligée de payer le réfrigérateur car il s’agit d’une dépense faite dans l’intérêt de la famille. La femme aussi est débitrice.
• Une dette qui a un débiteur :
Un détenu doit à l’État des amendes, des frais de justice. Il a été condamné à des dommages et intérêts à payer à ses victimes. Ces dettes sont ses dettes personnelles. Aucune autre personne, fut-elle son conjoint légitime, ne peut être obligé de les payer.
Il n’est, le plus souvent, et sauf, peut-être à la veille de sa libération, pas d’intérêt du condamné qu’une autre personne les paie.

Les dettes à l’égard de l’Etat ou des organismes publics

Petite histoire des frais de justice

Pendant longtemps, un condamné devait payer des frais de justice dont le calcul tenait compte des frais engagés : expertises, commissions rogatoires, …

Ces frais pouvaient atteindre des sommes de l’ordre de 20.000 francs pour un procès d’assises à la charge du condamné. Un certain nombre de détenus qui se trouvent aujourd’hui dans les prisons françaises et qui ont été condamnées avant 1993 ont encore des dettes de cette nature à payer.

La loi du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale a supprimé les frais de justice et les a remplacés par un droit fixe de procédure (art.800-1 du CPP).
Toute personne condamnée par un tribunal correctionnel doit payer 90 euros, par une Cour d’appel, 120 euros, par une Cour d’assises, 375 euros…
Lorsque plusieurs personnes sont condamnées pour une même infraction, elles sont solidairement responsables du paiement de ce droit (même article, alinéa 10).
Le recouvrement des sommes dues à l’Etat
Pour les recouvrer, l’Etat, représenté par le Trésor public, dispose de moyens plus puissants que les personnes privées, mais aussi de possibilités pour transiger.

Pour recouvrer ses créances, le Trésor public peut utiliser les saisies sur les biens du débiteur mais aussi la contrainte judiciaire, c’est-à-dire l’emprisonnement pour une période en rapport avec le montant de la dette.
Ex : lorsque l’amende est au moins égale à 2000 euros sans excéder 4000 euros, la contrainte judiciaire est au maximum de 20 jours (article 750 du CPP). Après la contrainte judiciaire, la dette n’est pas effacée.

Mais divers moyens de transaction existent pour le condamné :
  le condamné peut demander au Trésor public une remise gracieuse de sa dette.
  Le condamné peut demander le fractionnement du paiement de sa dette.
  Le condamné peut former un recours en grâce afin de suspendre le recouvrement de la dette.
Ex : un condamné a une longue peine reçoit un ordre de payer des droits de procédure. Il demande au Trésor public un délai et s’engage à payer sur ses futures rémunérations une somme de 20 euros par mois. La contrainte judiciaire éventuellement ordonnée par le Trésor public sera supprimée dès qu’il aura payé.
Ex : un condamné a une très lourde amende douanière transigera avec la douane qui lui accordera une grâce pour une partie de l’amende.

C’est à l’approche de la libération qu’il est souhaitable d’être en règle avec les créanciers qui peuvent prolonger la peine par une contrainte judiciaire.

Contrairement aux dettes civiles (dommages et intérêts), la loi ne prévoit pas un retrait automatique sur le compte du détenu. Les conditions du remboursement sont discutées entre le débiteur et le Trésor public.

Les dettes à l’égard des personnes privées

Il s’agit des condamnations à payer des dommages et intérêts aux victimes des infractions pour lesquelles le détenu a été condamné et, lorsque ces victimes se sont portées partie civile.

Le recouvrement des sommes dues aux parties civiles

Pour les recouvrer, la partie civile dispose des règles de droit civil et des voies d’exécution ; Elle ne peut pas utiliser la contrainte judiciaire.
Dans un certain nombre de cas, la victime est indemnisée par son assurance.

Un fonds de garantie existe pour indemniser les dommages corporels causés :
  par l’auteur inconnu d’un accident de voiture ou de chasse,
  par un acte de terrorisme,
  par la contamination par le virus HIV.

Dans tous les cas où la victime a été indemnisée par son assurance ou par le fonds de garantie, c’est eux qui se substituent à elle pour se faire rembourser par l’auteur du dommage.

Pendant l’incarcération du délinquant, la victime, l’assurance ou le fonds de garantie avaient droit à 10 % de la rémunération nette et/ou des sommes acquises par le détenu au-delà de 1.200 francs.
Les prélèvements pour la part « parties civiles » sont désormais progressifs.
Maintenant le prélèvement dépend des ressources du détenu :
  si le détenu reçoit moins de 200 euros dans le mois, aucun prélèvement n’est réalisé ;
  si le détenu reçoit 400 euros maximum : 20% sont prélevés sur la tranche 200/400 euros ;
  si le détenu reçoit 600 euros maximum : 20% sont prélevés sur la tranche 200/400 euros, et 25% sur la tranche 400/600 euros ;
  si le détenu reçoit plus de 600 euros : on prélève 20% entre 200/400 euros, 25% entre 400 et 600 euros, et 30% sur la tranche supérieure à 600 euros.

Pour s’assurer que le détenu pourra payer un créancier qui se ferait connaître plus tard, 1000 euros seront progressivement prélevés et mis de côté.

Pendant ou après l’incarcération, la victime, l’assurance ou le fonds peuvent, dans les mêmes conditions que tout créancier saisir les biens de l’auteur de l’infraction. Lorsque le délinquant est insolvable ce droit est illusoire.

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